Céline ITIÉ

Céline Itié

Parlez-nous de vous…

Je suis infirmière de formation. J’ai d’abord travaillé auprès de patients séropositifs pour le VIH. C’est d’ailleurs à l’occasion d’une formation au counseling, à l’éducation thérapeutique et au soutien à l’observance que j’ai rencontré Catherine Tourette-Turgis. Je suis devenue cadre de santé et j’ai mis en place plusieurs programmes d’ETP dont deux en néphrologie. Aujourd’hui, j’ai un poste de coordinatrice de recherche clinique à l’hôpital européen Georges Pompidou et mon employeur m’a proposé de faire un doctorat. J’ai tout naturellement demandé à Catherine d’être ma directrice de thèse.

Quel est le sujet de votre thèse ?

J’ai choisi d’étudier le travail émotionnel de personnes atteintes d’une pathologie chronique : l’insuffisance rénale. Ce sujet a été étudié côté soignants mais a priori jamais côté malades. Comment leurs interactions quotidiennes se passent-elles ? Comment ressentent-ils ce que les autres leur renvoient ? Que comprennent-ils de ce que l’autre comprend ? Comment le vivent-ils ? Comment le gèrent-ils ? Quelles sont les stratégies utilisées ? En quoi ça leur coûte émotionnellement et cognitivement ? Et en quoi ça les aide à vivre dans un contexte d’incertitude et d’impermanence ?

Je veux ainsi essayer de rendre intelligible et valoriser le travail que les personnes qui vivent avec une insuffisance rénale font sur leurs émotions au quotidien.

Pourquoi avoir choisi ce sujet de recherche ?

Je crois qu’on ne choisit pas son sujet par hasard. Il fallait que ça ait du sens pour moi, du sens pour la collectivité mais surtout pour le champ de la santé et de l’éducation thérapeutique pour les patients.
J’ai choisi la néphrologie parce que j’ai beaucoup accompagné ces patients dont la trajectoire de vie est une succession d’épreuves : annonce de la maladie, dialyse, greffe, absence de guérison définitive… Dans les entretiens réalisés, ce sentiment d’impermanence est particulièrement exacerbé.

Quant au sujet du travail émotionnel, j’ai toujours été bluffée par la capacité des malades à arriver avec le sourire, à me demander des nouvelles de ma famille et je me suis rendue compte que je ne savais rien de ce qu’ils ressentaient en réalité. J’ai d’abord songé à étudier les compétences émotionnelles développées mais c’était trop restrictif. Et j’ai découvert le concept de travail émotionnel qui inclue l’influence des facteurs sociaux.

Qu’est-ce que cette thèse vous apporte ?

Elle m’offre la possibilité de mieux comprendre un processus essentiel dans la vie des malades. C’est aussi une opportunité d’apprendre une forme de recherche complémentaire à la recherche clinique que je coordonne professionnellement.

Vous avez le droit à un vœu pour la société, quel est-il ?

Je souhaiterais plus d’écoute. On ne sait pas écouter l’autre, même quand on croit écouter. La sensibilisation et la formation aux compétences émotionnelles seraient salutaires.